Tonte et biodiversité

D’avril à juin, Stop tondeuses !

Un article de Jean-Louis Hemptinne, Mars 2023.

Pourquoi ?

L’humanité est confrontée à deux défis majeurs interdépendants : le dérèglement climatique et l’érosion rapide de la biodiversité. Depuis le mois de mars 2020, celle-ci a fait plusieurs fois la une des médias car elle a sans doute favorisé l’apparition du Covid-19, comme d’autres épidémies d’origine animale apparues précédemment. En effet, l’augmentation des infrastructures construites par les humains et la déforestation rapprochent les humains des animaux sauvages. Cette promiscuité accrue crée un contexte favorable pour la transmission de nouvelles maladies.

En Europe, l’effondrement de la biodiversité prend un autre visage : la raréfaction des insectes. Leur abondance s’est réduite de 80 % au cours des 25 dernières années. Les insectes assurent de nombreux fonctions dans la nature (on parle de services écosystémiques dans le jargon des chercheurs) si bien que leur raréfaction a un impact direct sur le bien-être des hommes. Par exemple, la diminution des effectifs d’insectes pollinisateurs met en péril la reproduction de la plupart des plantes dont les hommes se nourrissent. En effet, les pollinisateurs les fertilisent en transportant le pollen de l’une à l’autre. La fertilisation des fleurs est indispensable pour déclencher la mise à fruit.

Les experts internationaux estiment qu’on peut encore éviter de perdre inexorablement la biodiversité à condition d’agir rapidement dans les 10 prochaines années.

La crise de la biodiversité ne se joue pas que dans le bassin de l’Amazone ou dans les forêts africaines. Elle se déroule aussi sur le pas de nos portes ! Dans chaque ville, les espaces verts publics, les bords de route et les fossés, les espaces verts des zones d’activité ou les jardins privés forment une toile verte d’une superficie impressionnante, un véritable réseau de nature qui doit être mis à profit pour offrir des ressources alimentaires et des habitats aux espèces sauvages. Encore faut-il apprendre les techniques écologiques de gestion de ces espaces et cesser de les tondre régulièrement.

Redéployer de manière significative la biodiversité nécessitera de réduire les surfaces bétonnées ou couvertes de bitume. Les actions en faveur de la biodiversité contribueront alors à atténuer les effets du réchauffement du climat.

Comment ? Tondre moins mais mieux !

Tondre fréquemment les pelouses empêche la plupart des espèces de plantes de fleurir et de produire des graines. Celles-ci disparaissent donc petit à petit, faute de se reproduire. Au contraire, les graminées (les herbes) supportent bien ce régime. Plus on les coupe, plus elles repoussent du pied. Grâce à ces repousses, elles colonisent rapidement le terrain au détriment des autres plantes qui ne peuvent réagir de la même manière.

De plus, si l’herbe coupée n’est pas ramassée et laissée sur place, elle se décompose et enrichit le sol. Or, la plupart des espèces de graminées des pelouses sont très compétitrices : c’est-à-dire qu’elles captent plus vite que les autres espèces les matières nutritives libérées par l’herbe coupée. Elles poussent donc de plus belle ! En tondant fréquemment, nous favorisons les plantes qui repoussent le mieux après la coupe et, en plus, nous nourrissons ces plantes. Donc, plus on tond, moins il y a de diversité florale et plus il faudra tondre.

Laisser la tondeuse au repos, c’est la meilleure manière de casser ce cercle vicieux.

Pour y arriver, il faut tondre moins souvent, à des moments judicieusement choisis en fonction de l’écologie des végétaux et en appliquant des techniques qui freinent l’exubérance des herbes. Il ne s’agit donc pas d’abandonner la pelouse mais de l’entretenir autrement et mieux pour favoriser le retour des plantes à fleurs.

« Tondre moins mais mieux » ne veut pas dire abandonner votre jardin et le laisser devenir un espace peu accueillant, envahi de végétation exubérante. Au contraire, l’idée est de partager l’espace avec les fleurs, les insectes, les oiseaux et les petits mammifères, comme le hérisson. Essayer de « tondre moins mais mieux » sur 25 à 30 % de votre jardin. Pour la biodiversité, ce sera magnifique ! Ailleurs, n’hésitez pas à tondre pour aménager un espace pour que les enfants puissent jouer ou que les parents puissent prendre l’apéro !

Concrètement :

  1. « Tondre moins mais mieux » 25 à 30 % de la surface du jardin.
  2. Tondre au début du mois de juillet. A ce moment, la majorité des plantes est sèche et a disséminé ses graines. Ne pas oublier de ramasser l’herbe coupée et de la composter. Comme il s’agit de matière déjà assez sèche et bien fibreuse, elle va se composter sans effort.
  3. Tondre une deuxième fois, si nécessaire, en novembre ou décembre. Ne pas oublier de ramasser !

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